Le marché unique numérique ou marché numérique unique est une politique menée par la Commission européenne visant à créer au sein de l’Union européenne les conditions d’un marché unique dans le numérique. Cette politique a été annoncée par la Commission Juncker en mai 2015. Elle est mise en œuvre par le Commissaire européen à la société numérique avec l’appui de la DG CONNECT.
Cette stratégie pour un marché unique numérique repose sur trois piliers:
Améliorer l’accès aux biens et services numériques dans toute l’Europe pour les consommateurs et les entreprises
Mettre en place un environnement propice au développement des réseaux et services numériques
Maximiser le potentiel de croissance de notre économie numérique européenne.
Pour atteindre ses objectifs, l’Europe est confrontée notamment à trois challenges : la concentration des acteurs, l’évasion fiscale et les inégalités liées au numérique (fracture digitale).
Le marché unique numérique stimule l’économie, réduit l’incidence sur l’environnement et améliore la qualité de vie grâce au commerce électronique et à l’administration en ligne. Les services, privés et publics, passent de plateformes fixes à des plateformes mobiles et sont toujours plus omniprésents. Ces évolutions nécessitent un cadre réglementaire européen pour développer l’informatique en nuage, l’accès transfrontalier à des contenus en ligne et la connectivité mobile des données sans frontières, tout en garantissant la protection de la vie privée et des données à caractère personnel et en assurant la cybersécurité. Les réalisations législatives du Parlement en matière de construction du marché unique numérique européen contribuent à hauteur de 177 milliards d’euros par an à la croissance européenne. Tel qu’il a été mis sur pied par le Parlement européen à l’appui des recherches et des preuves scientifiques élaborées pour ses commissions et groupes de travail, le marché unique numérique européen a joué un rôle essentiel dans la préservation de l’économie de l’Union et l’aide aux citoyens européens pendant la crise de la COVID-19.
L’élimination des entraves nationales aux transactions en ligne est au cœur du marché unique numérique. Celui-ci repose sur le concept du marché commun, destiné à libéraliser les échanges entre États membres dans le but d’accroître la prospérité économique et de contribuer à «une union sans cesse plus étroite entre les peuples», et qui a débouché sur le concept de marché intérieur, défini comme «un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée». Dans le prolongement de la stratégie de Lisbonne, la stratégie Europe 2020 a instauré la stratégie numérique pour l’Europe en tant que l’une des sept initiatives phares, reconnaissant ainsi le rôle moteur essentiel que les technologies de l’information et de la communication (TIC) seront appelées à jouer si l’Union européenne veut réaliser les ambitions qu’elle s’est fixées à l’horizon 2020. Le marché unique numérique a été élevé au rang de priorité par la Commission dans sa stratégie pour un marché unique numérique [COM(2015)0192] et, récemment, dans le programme pour l’Europe 2019-2024 de la présidente de la Commission.
Marché unique numérique et intelligence artificielle
De prime abord, le marché unique numérique peut paraître comme une simple extension à l’environnement numérique du marché intérieur. En réalité, sa portée est bien plus importante, dans la mesure où il concerne la régulation des contenus, l’utilisation des technologies pour faciliter les échanges internes et externes à l’Union européenne, mais aussi les infrastructures nécessaires au développement des technologies du numérique. Ainsi, le numérique constitue d’abord l’outil privilégié de parachèvement du marché intérieur. Les technologies numériques permettent de supprimer aisément les obstacles aux frontières et d’encourager le développement du commerce électronique transfrontalier. Ensuite, les enjeux économiques des technologies numériques, à l’instar des smart contracts, de la blockchain, des voitures autonomes ou encore de la santé connectée, sont tels que l’Union européenne doit mettre en œuvre des règles d’encouragement et stimulation de l’innovation et de la concurrence, afin d’être bien positionnée dans la compétition mondiale qui s’ouvre. Enfin, les choix de régulation du numérique faits par les institutions européennes montrent une volonté de protéger les valeurs sociales et les droits fondamentaux consacrés par la charte de l’Union européenne, à l’instar de la protection des données personnelles et de la vie privée. L’adoption du RGPD est la quintessence de cette approche européenne et témoigne de l’impact que pourrait avoir l’Union européenne dans la régulation du numérique à l’échelle mondiale. La Commission européenne a fait du marché unique numérique une priorité matérialisée par la publication de plusieurs textes relatifs aux nouvelles technologies dont, la plus dominante aujourd’hui, l’intelligence artificielle. Son livre blanc – publié en février 2020 et destiné à contrer les avancées américaine et chinoise – montre une volonté d’excellence, de confiance et de règles cohérentes en la matière. Le présent ouvrage rend compte de la dimension matérielle du marché unique numérique, tout autant qu’institutionnelle et conceptuelle, et de l’intelligence artificielle. Il propose une vision claire de l’Union européenne dans son environnement technologique.
Marché unique numérique et droit d’auteur
Après deux ans d’âpres négociations, les institutions européennes ont définitivement approuvé la directive sur le droit d’auteur le 15 avril 2019. L’Union européenne valide ainsi le principe d’une meilleure rémunération des artistes et éditeurs de presse à partir du trafic généré par leurs contenus sur des plateformes comme Google ou YouTube. En France, ces dispositions s’appliquent depuis le 24 octobre 2019.
La France a transposé la directive dans son droit le 23 juillet 2019, pour une entrée en vigueur le 24 octobre de la même année. Mais avant même l’expiration de son délai de transposition dans l’ensemble des Etats membres, le texte a été remis en cause par Google. Le géant américain du numérique a en effet fait savoir dès le 25 septembre son refus de payer aux éditeurs de presse le droit voisin (voir plus bas) créé par la directive.
Dès lors, pour les éditeurs de presse refusant que Google Actualités référence leurs contenus gratuitement, ceux-ci n’apparaissaient désormais plus que par un titre comportant un seul lien vers l’article, et non une image et un extrait du contenu comme auparavant. Une disposition qui permettait au moteur de recherche de rester conforme à la directive européenne. Mais que la France et l’Allemagne critiquent vivement, tenant à “[réaffirmer] leur détermination à mettre en œuvre la nouvelle directive européenne sur le droit d’auteur et à assurer le plein respect de ces règles” (déclaration commune suivant le conseil des ministres franco-allemand du 16 octobre).
Qui est concerné par le droit d’auteur ?
Né avec le développement de l’imprimerie et la diffusion des livres, le droit d’auteur s’est peu à peu étendu à tout créateur d’œuvre originale. De manière non exhaustive, sont concernés : les créations musicales, cinématographiques, les écrits journalistiques, les photographies, les créations de mode, les logiciels, etc. Le droit d’auteur protège également ceux que le jargon juridique qualifie d’ayants-droits : les héritiers et les personnes ou entités qui auraient racheté les droits des créateurs, comme le font les maisons de production.
Pourquoi l’Union européenne a-t-elle souhaité moderniser le droit d’auteur ?
Certaines facettes du droit d’auteur ont déjà été harmonisées à l’échelle européenne. Mais cette législation remonte à 2001, à l’heure où Internet balbutiait encore. L’explosion du numérique et l’émergence des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ont mis le droit d’auteur face à de nouveaux défis : Google doit-il payer pour afficher une photographie en miniature sur son moteur de recherche ? Et lorsqu’il enregistre des “clics” via ses agrégateurs de contenus qu’il n’a lui-même pas produit ? Un titre ou un hyperlien peuvent-ils être protégés par le droit d’auteur ? Quid des clips musicaux chargés sur YouTube par les internautes, sans rétribution des auteurs ou de leurs ayants-droits ? Les questions adressées à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) se sont multipliées pour savoir comment interpréter la directive de 2001, poussant la Commission européenne à entreprendre l’adaptation de sa législation à l’ère numérique.
Que contient la version finale de la directive ?
Comme l’indique le Parlement européen, la directive sur le droit d’auteur, telle que votée le 26 mars 2019, doit permettre aux titulaires de droits (les créateurs) et aux éditeurs de presse “d’obtenir de meilleurs accords de rémunération” pour l’utilisation de leurs œuvres et contenus “figurant sur les plateformes internet”. La loi européenne rend ainsi les plateformes “directement responsables des contenus uploadés sur leur site et donne automatiquement le droit aux éditeurs de presse de négocier des accords au nom des journalistes pour tout article utilisé par les agrégateurs de nouvelles”.
À retenir :
La stratégie pour un marché unique numérique vise à faire en sorte que l’économie, l’industrie et la société européennes tirent pleinement parti de la nouvelle ère numérique. Parallèlement aux solutions et aux données électroniques et aux services numériques transfrontières, cette stratégie fait partie intégrante du projet de l’UE pour une Europe numérique.
L’UE a déjà entamé la création d’un marché unique numérique libre et sécurisé permettant aux particuliers de faire leurs achats en ligne par-delà les frontières et aux entreprises de vendre en ligne dans toute l’UE.